mercredi 15 janvier 2014

Les p'tits détails

Ce sera un billet sur les petits riens, ou les éventuelles grosses différences, en vrac et non exhaustives, qui chatouillent l'oreille et le coin de l'œil et vous signalent que vous êtes en Irlande.

À Dublin, je suis un petit tournesol : le matin je marche vers l'est et le soir
 je rentre à l'ouest. En été j'en avais besoin de lunettes de soleil. En hiver,
partant de la maison vers 8h20, j'assiste au lever du soleil.

Évidemment la conduite à gauche, enfin pour les piétons la direction du regard à inverser avant de traverser ; mais comme les british, ils ont des "look right", "look left" au pied des trottoirs. Toute la signalisation, le marquage des routes etc. sont complètement anglais, j'ai été presque déçue en arrivant, pas de nouveau là-dessus pour moi.
Les feux de circulation ou plutôt leur alternance et leur logique ont été dans les premières semaines un immense mystère. Ils sont très longs. Pour les voitures. Un piéton attend facilement 40 secondes avant de pouvoir traverser, ce qui est très agaçant. J'ai vu des gens piquer un sprint pour pouvoir attraper le vert à un passage particulièrement pénible.
Ce qui préside à l'étrange balai des feux, c'est la décision de ne jamais faire circuler voitures et piétons en même temps. Quand le feu est vert pour les piétons, toutes les voitures sont à l'arrêt, et quand un axe routier puis l'autre est au vert, les piétons attendent donc deux "tours." Ah ben non, on ne met pas du vert piéton entre chaque passage des voitures, tout de même. On finit par comprendre et on s'adapte, mais le plus absurde est que parfois la rue que l'on veut traverser est à sens unique : toutes les voitures devant moi sont à l'arrêt, le reste de l'intersection circule, et au début j'hésitais à passer, car il est difficile de prévoir le basculement. Les feux piétons sont très courts, donc si vous avez l'intention de traverser une intersection en diagonale, vous vous faites avoir, impossible de faire les deux côtés d'un coup. Vous me direz qu'il n'y a qu'à passer réellement en diagonale, ce qu'étonnamment les dublinois ne font que très peu, ils attendent assez sagement les feux. En bonne parisienne, je continue à traverser n'importe où et n'importe quand, mais c'est surprenamment plus difficile qu'à Paris, tout l'équilibre des rapports voitures-piétons sont différents. 
Pour finir avec la circulation, comme en Angleterre, il n'y a pas de passage piéton à tous les "bras" d'une intersection. Pour une intersection en T, vous en aurez un sur le pied, puis sur une des branches mais pas l'autre. Quand on souhaite aller dans l'autre direction, c'est pô pratique. Il faudrait traverser la base du T, puis la branche, puis revenir et passer en face d'où on était avant.
Bref, je laisse le sujet, j'ai à peu près réussi à faire ma paix avec ce système ;o)


Dans les premiers jours, pendant la recherche d'appartement, les coups de téléphone déroutent par le changement des tonalités. On croit que c'est occupé quand ça ne fait que sonner, et inversement.

Pour les visites, je découvre que les adresses ici sont rarement précises. Il n'y a pas de numéro sur les bâtiments, ou rarement, ils ont des noms, qui ne sont pas toujours marqués suffisamment en évidence. Et les noms, contrairement au nombres, ne sont pas ordonnés, haha - private joke pour ceux qui ont suivi mon mémoire de master.
Du coup, plusieurs fois j'ai frôlé la crise de nerf en ne trouvant pas le bâtiment, dû demander aux passants et commerçants, finalement sauvée par un habitant qui m'avait entendue en fumant à sa fenêtre - true story - trouver la porte, tomber sur un digicode dont j'ignore la combinaison, passer avec un voisin, tomber sur des boîtes aux lettres sans noms, batailler avec mon pti téléphone pour récupérer le numéro de téléphone du locataire sur le site de colocation, avoir un malentendu avec lui sur le numéro de l'appartement et celui de l'étage. Et je vous passe des détails. Rester aimable.
En retard après cette visite, j'ai vécu à peu près la même mésaventure juste après avec la variation que le bonhomme n'avait pas laissé son numéro sur le site. J'étais déjà assez remontée, vous pensez bien. Je passe encore une fois la porte avec une voisine, et encore une fois les boîtes aux lettres ou plutôt l'étagère à lettres ne comporte pas de noms. Je deviens très remontée et jure que je trouverai ce #£%^$h d'appartement. C'est un grand immeuble, il y a au moins quatre étages, j'entreprends de frapper aux portes. L'un des occupants, qui écoute sa télé très fort, en augmente le son en entendant mes coups. Charmant.
Une adorable voisine regardera sur mon téléphone les photos postées sur le site internet, demandera à son mari, je sais qu'un des colocataire est français, elle suppose qu'il pourrait s'agir de l'appartement tout au bout à gauche à l'étage du dessus. Je remercie. Elle avait raison et je ne suis pas revenue le lui dire. J'ai enfin visité cet appartement en même temps qu'une autre candidate, danoise je crois, avec la coloc suédoise (norvégienne ?). Je n'avais pas tout perdu : c'est grâce à elle que j'ai entendu parler du site Meet Up.

En conclusion, ils ont des noms sur leurs bâtiments et des numéros sur leurs boîtes aux lettres, tout l'inverse de chez nous. 


Tout ça, c'était un mardi. Mon deuxième jour de travail.
J'attendais la réponse de l'appartement du lundi, qui m'avait beaucoup beaucoup plu, et dont j'ai su le mercredi que je n'y habiterai pas. Gros coup de mou.
Le jeudi je quittais le canapé qui m'avait accueillie pour ces premiers jours et déménageais vers un hôtel. Avoir un lit, une pièce à moi toute seule et même une salle de bain (même si j'ai mal compris le fonctionnement de la douche, surtout le volume) m'a fait du bien et redonné de l'énergie. J'ai envoyé ce soir-là une dizaine de requêtes pour des chambres en colocation, dont celle qui est maintenant la mienne et que j'ai visitée dès le lendemain vendredi. 


Une fois emménagé, le mercredi 1er mai, j'ai pu m'intéresser à des choses plus futiles - et avoir un volume d'eau suffisant sous la douche. J'ai donc réalisé que l'eau d'ici n'était pas calcaire. Pour un parisien ça a une définition simple : tu n'as pas la peau qui pèle en sortant de la douche, tu vois ce que je veux dire ?
C'est cool :o)
J'avais amené un gros pot de crème pour le corps qui est encore loin d'être fini.

Et le soir de ma fenêtre j'admire le coucher de soleil, côté O'Connell
Street, là où est the Spire (c'est le truc qui dépasse).



En septembre est arrivé un ami parisien de ma sœur, que j'ai emmené avec moi au "monday drinks" du groupe Meet Up "New and not so new in Dublin". Il était tout frais descendu de l'avion la veille et a donc pu remarquer, un peu ébahi, que tout le monde se serrait la main. 
Eh oui, plus de bises, on se serre la pince et on se secoue les mains de tous les côtés ; franchement, c'est presque plus pratique et ça évite des incertitudes.
Quand on est un peu plus intime on se fait des "hugs". Grandes embrassades des deux bras dans le dos avec corps à corps et croisement des têtes, mais attention aux habitudes françaises : toujours pas de rencontre lèvres-joues ni de bruit équivalent ! (quasi vécu, l'interlocuteur fait une drôle de tête).

Allez, c'est l'occasion de citer la "dédicace" de Ubu (de tête, j'espère que c'est ça) :
"Adoncques le Père Ubu hocha la poire, et fut depuis nommois par les Anglois Shakespeare."
(Comment ça quel est le rapport ? Secouer les mains, hocher les poires, c'pareil non ?)(bon d'accord, je ne sais pas pourquoi ça m'a sauté dans la conscience maintenant).

Un autre lever de soleil,.
J'en ai plein

Pour la conversation courante, l'irlandais dit "how are you?" comment phrase d'attaque, même par des gens qui font du démarchage dans la rue, ce qui m'a déstabilisée jusqu'au moment où j'ai compris que c'était l'équivalent conversationnel de "hello" et qu'il ne fallait pas vraiment répondre. Évidemment, c'est souvent prononcé à peu près "awaya."

Si vous voulez répondre à cette question, ou par exemple si je la pose à mes colocs, la réponse irlandais officielle est : "not too bad."
Surtout jamais "fine" ou "good", vous passeriez pour un américain mal dégrossi :D
Sur l'Irish Times un article hilarant sur la question.

Va avec la photo précédente et la suivante.

Dans les moments où l'envie vous prend de faire du shopping en ligne, vous découvrez que les Amaz*n, Cl*rks et autre boutiquiers divers existent uniquement en version UK ! Dont, comme vous avez bien révisé pour ne pas faire de bourde, la fière république d'Irlande ne fait absolument pas partie. Bazar et frustration en perspective.
Je suppose que le marché irlandais est un peu trop petit pour qu'ils se coltinent de nouvelles conventions et tractations et contrats avec le droit irlandais. Diverses techniques de contournement existent, dont une de "boîte de dépôt" à Dublin techniquement domiciliée en UK, je ne m'en suis pas (encore) servi et ai assez mal suivi le principe.

Enfin, avec l'hiver, je découvre la joie des radiateurs et du chauffage.
L'architecture/plomberie/électricité/équipement pourrait mériter un billet. Comme en Angleterre les portes se ferment seules et on a besoin de cales-portes pour qu'elles tiennent ouvertes ; j'ose espérer que c'est fait exprès. Les chasses sont aussi flaibardes qu'outre-mer d'Irlande, une partie des lavabos est encore équipée de deux robinets : un pour l'autre froide un pour l'eau chaude, c'est-à-dire un pour la glacée, un pour la bouillante. Chacun a entendu parler de quelqu'un qui avait le même système dans sa douche. Dans mon appartement l'eau chaude est à actionner sur un minuteur, donc il faut y penser 45 bonnes minutes avant de vouloir prendre sa douche, puis surtout ne pas oublier l'heure ou vouloir la prendre 30 minutes plus tard. Pour la même raison, faire la vaisselle devient parfois extrêmement pénible. Je commence à avoir des réflexes bizarres en sortant de la douche : viiiite, le paic citron !
Aux vacances de Noël j'ai demandé trois fois si je pouvais encore me doucher ce soir, ou bien, si jamais je changeais d'avis, s'il y aurait encore de l'eau chaude le lendemain matin... au grand étonnement de ma tante qui ne voyait pas le problème.

Le chauffage, donc.
Mon immeuble doit avoir cinq ans à tout casser, et est équipé de radiateurs individuels électriques.
Voui voui.
L'électricité coûte moins cher après 23h, tout le monde est donc équipé de "storage heaters" qui emmagasinent la chaleur pendant la nuit et la relâchent pendant la journée : quand vous n'êtes pas là ! Utile ;o)
Heureusement j'ai dans ma chambre un machin sur minuterie...
L'année dernière, mes colocs se sont retrouvés avec une facture bimestrielle de 600€ d'électricité, parce qu'ils avaient une coloc qui voulait garder sa chambre "warm" (ce qui ne paraît pas complètement insensé non plus).
On est donc censés être dans du neuf, avec fenêtres bien isolées et tout ça ; c'est pourtant mes rideaux qui me protègent le plus me semble-t-il, la température entre la vitre et eux est souvent glaciale, et au réveil - j'ai acheté un thermomètre - il fait moins de 15° dans ma chambre, ce que je considère comme frisquet.

Résultat : j'ai commencé à prendre ma douche le matin plutôt que le soir, la perspective de l'eau chaude m'aidant à sortir du lit. À condition de n'avoir pas oublié la veille de préparer la minuterie à la bonne heure !!!


Job related: j'ai été prolongée de six semaines, mon contrat se termine maintenant le vendredi 21 mars, ce qui est la limite des fameux 11 mois indépassables dont on nous a tant parlé.
Après, ben faut chercher, un truc intéressant si possible, à Dublin ou ailleurs à l'étranger peut-être, voilà ce qui me ferait envie.
(j'avais postulé à un super truc à New York, mais bizarrement je n'ai pas été prise. Ils ont écrit à tous les candidats pour dire que le poste n'était plus vacant, c'est gentil quand même).